Sous les couches de schiste du sud de l’Alberta se trouve l’un des trésors naturels les plus extraordinaires de la Terre, une pierre précieuse qui attire la lumière aussi clairement aujourd’hui qu’à l’époque des dinosaures. Cette coquille fossilisée, connue sous le nom d’ammolite, brille dans des couleurs changeantes de vert, pourpre, or et rubis, et est préservée depuis plus de 70 millions d’années. Longtemps admirée par les bijoutiers et les communautés autochtones, l’ammolite attire aujourd’hui l’attention des scientifiques qui souhaitent savoir comment ses couleurs ont survécu à l’épreuve du temps. Une recherche de l’Université de l’Alberta, publiée dans la revue Scientific Reports, révèle que son éclat n’est pas une coïncidence, mais le résultat de minuscules nanostructures qui manipulent la lumière d’une manière que la nature a perfectionnée il y a des millions d’années.
Comment se forme l’ammolite ?
L’ammolite provient des ammonites, des animaux marins à coquilles en spirale qui prospéraient dans les mers chaudes et peu profondes du Crétacé supérieur. Lorsque ces créatures sont mortes, leurs coquilles se sont déposées sur le fond marin qui est ensuite devenu une partie de la formation Bearpaw, une couche géologique qui s’étend sur certaines parties du Canada et des États-Unis. Au fil des millions d’années, les sédiments, la pression et la minéralisation ont transformé ces coquilles en fossiles irisés.Alors que la plupart des fossiles prennent une couleur gris ou brun terne, les coquilles d’ammonites préservées dans les schistes de l’Alberta ont évolué différemment. Des combinaisons spécifiques de minéraux, notamment d’aragonite, une forme instable de carbonate de calcium, et de composés organiques ont contribué à conserver leur couleur. Les communautés autochtones Pieds-Noirs, qui ont découvert ces pierres il y a des siècles, les appelaient Inisquim, qui signifie « pierre de bison », et les considéraient comme des symboles de chance.Dans les années 1980, l’ammolite a été officiellement reconnue comme une pierre précieuse, plaçant le Canada aux côtés de pays connus pour leurs opales, leurs rubis et leur jade. Cependant, pour les érudits, leur valeur va bien au-delà de la décoration ; Il s’agit d’une archive géologique de la vie ancienne et de la physique de la lumière.
Comment l’ammolite crée-t-elle la couleur ?
Pour découvrir les origines de son éclat éternel, des chercheurs de l’Université de l’Alberta ont examiné de fines sections d’ammolite au microscope électronique. Ce qu’ils ont trouvé, ce sont des milliers de couches empilées de cristaux d’aragonite, chacune d’une épaisseur de seulement quelques centaines de nanomètres. Ces feuilles microscopiques agissent comme des miroirs qui interfèrent avec la lumière entrante, réfléchissant différentes longueurs d’onde pour produire des couleurs structurelles vives, similaires à l’irisation observée dans les plumes de paon, les coquilles de coléoptères et la nacre.La couleur de chaque pierre dépend de l’épaisseur de ses couches. Les couches minces reflètent les bleus et les verts, tandis que les couches épaisses produisent les rouges et les oranges. Étant donné que les processus naturels au cours de la fossilisation modifient ces couches de manière inégale, chaque spécimen d’ammolite forme son propre motif et sa propre palette de couleurs.Ce qui rend cette découverte remarquable, c’est la préservation elle-même. En règle générale, l’aragonite se dégrade au fil du temps géologique, perdant ainsi ses propriétés optiques. Cependant, dans l’ammolite, les oligo-éléments et les composés bitumineux des schistes environnants ont stabilisé la structure et l’ont protégée de la dégradation chimique. Le résultat est un fossile qui réfracte encore la lumière avec une efficacité presque parfaite, un cristal photonique naturel formé avant l’existence de l’homme.
Où trouve-t-on l’ammolite ?
L’exploitation commerciale des ammolites se produit presque entièrement dans une zone étroite du sud de l’Alberta, près des villes de Lethbridge et de Magrath. Le gisement est situé à quelques mètres seulement de la formation Bearpaw, ce qui en fait l’une des pierres précieuses les plus limitées géographiquement de la planète. L’extraction demande de la patience et de la précision : les couches fossiles sont fragiles et même de petites vibrations peuvent détruire la surface de la gemme.Parmi les centaines de fossiles d’ammonites découverts, seule une petite fraction produit des ammolites de qualité gemme. Cette rareté, combinée au jeu de couleurs ardentes, en fait l’une des pierres précieuses organiques les plus précieuses du marché. Cependant, pour les communautés locales, sa valeur va au-delà du commerce. Beaucoup le considèrent encore comme un être spirituel qui représente le renouveau et l’équilibre, rappelant que la beauté peut perdurer à travers les âges.
La science de la formation de nouveaux matériaux
Au-delà de son histoire géologique et culturelle, l’ammolite offre des enseignements pour la science moderne. L’étude de Scientific Reports met en évidence à quel point l’ingénierie précise dans la nature peut inspirer les matériaux synthétiques. La manière dont les nanorevêtements d’ammolite contrôlent et maintiennent la couleur pourrait aider à concevoir des revêtements photoniques, des films à changement de couleur et des capteurs optiques qui imitent leur efficacité.En comparant l’ammolite fossilisée à la nacre moderne (le matériau qui tapisse l’intérieur des coquillages), les chercheurs ont constaté que leur comportement optique reste remarquablement similaire, malgré le vaste écart temporel. Cela suggère que la fossilisation, dans de bonnes conditions chimiques, peut préserver l’ordre à l’échelle nanométrique avec une précision étonnante. De telles idées pourraient aider les scientifiques à stabiliser les biomatériaux modernes ou à développer de nouveaux pigments conservant la fluorescence sans colorants synthétiques.L’ammolite n’est donc pas seulement une relique, mais une expérience naturelle figée dans la pierre qui existe comme preuve que la biologie et la physique peuvent converger pour créer une lumière perpétuelle.
Enregistrer l’ammolite MARVEL NATUREL LIMITÉE
L’ammolite ne se trouvant que dans une seule région, la durabilité est la clé de son avenir. Les opérations minières en Alberta sont réglementées pour limiter les perturbations environnementales et nécessitent la restauration des sites excavés. Les scientifiques et les géologues collaborent également pour cartographier plus précisément les gisements potentiels, dans le but de réduire les forages inutiles.Cependant, l’ammolite reste limitée. Une fois les gisements de la Formation Bearpaw épuisés, aucune nouvelle source ne devrait émerger. Ce fait ajoute une urgence à sa préservation et à son étude. Chaque partie porte une histoire mêlant géologie, évolution et physique optique, une fusion rarement vue dans la nature.Les surfaces irisées des pierres précieuses, qui faisaient autrefois partie d’un organisme marin vivant, fournissent désormais des indices sur le comportement de la lumière et l’endurance du matériau. Tenir un morceau d’ammolite, c’est comme tenir une trace d’océans anciens et un miroir du pouvoir créateur de la planète, un rappel que même dans les temps anciens, la couleur peut survivre.Lire aussi | Pourquoi nous voyons les choses dans le noir : comment fonctionne notre cerveau en l’absence de lumière
